Donner à voir l’île de Mayotte amène à se poser la question du point de vue. En photographie, la notion est importante. Où se placer ? Où placer la caméra ? Quoi montrer ? Pourquoi ? L’objectif, naturellement, est de signifier d’où l’on parle. La démarche de l’écrivain est semblable à celle du photographe, à ceci près qu’il raconte les siens, qu’il se raconte, avec sa sensibilité, avec le risque de la subjectivité. Mais quel est la vérité́ en Art, si elle n’est pas subjective ? Tout ce projet repose sur une forme de subjectivité. Beaucoup de livres de photos sont parus sur Mayotte mais c’est souvent avec la sensibilité du passant, du voyageur, qui pose un regard distant, extérieur à l’île. Aucune prétention de dire à la place des autres n’a été notre parti pris. Aucune volonté non plus de plaquer un discours convenu, ni de relayer une parole autorisée. Notre seule démarche a été de voir, de vivre et de partager une sensibilité. Un regard, un point de vue. Ce sont des gens rencontrés, une fois, plusieurs fois, et qui se sont racontés au photographe d’abord et dont le journaliste et écrivain a tenté de rendre compte avec sincérité. Ce projet est un regard croisé entre un photographe qui découvre, s’émeut et s’interroge, et un auteur qui tente de comprendre son île pour la restituer dans sa beauté brute, sans concession. Ce sont des visages, des scènes du quotidien, des mains, des figures complexes, variées, riches, qui racontent la somme d’une île. Celle d’un désir singulier d’être libre dans le monde, avec les autres.